J'avais retrouvé mon père, j'avais même rencontré ma tante et mon cousin. Il allait nous falloir du temps à tous pour nous acclimater à cette nouvelle perspective. Je ne voulais pas m'imposer dans leur vie, tant de chose avait changer depuis ma mort après tout, je ne pouvais pas imposer cela à qui que se soit. Je continuais donc à faire ma p'tite vie, dans le bâtiment où j'avais élu domicile avec des dizaines de personnes. On été bien comme ça. J'avais même aperçu Hunter Volturi il y a quelques instants. Il était venu prendre de mes nouvelles suite à notre dernière rencontre. Il avait su où me trouver... étrange que ses rois n'en ai pas fait autant du coup. Il m'avait aidé à retourner vers mon père lorsque moi-même je restais en retrait, attendant de me réveiller du cauchemar qu'était cette ville. Nous nous quittons sur le seuil de la porte après un bon quart d'heure à discuter de cela et du reste, de cette réunion où nous nous étions rapidement entrevue et où l'idée du sang synthétique avait immergé et que mon boss avait pris à bras le corps.

Je me dirige vers le centre ville, j'ai prévu de passer à la bibliothèque. Autant profiter de ce temps de merde aujourd'hui pour lire, ça ne m'est pas arrivé depuis un certain temps. Pourtant je ne fais pas dix mètres que je tombe sur mon père. Il me regarde bizarrement et je ne suis pas sûre qu'un "bonjour" soit le bienvenue pourtant c'est la première chose que l'on dit à quelqu'un que l'on croise pour la première fois de la journée, quelle soit bonne ou non.

- Bonjour papa. Comment vas tu ? Je suis contente de te voir!

Je lui fais mon plus beau sourire, celui qui n'est réservé qu'à lui.

Un temps de chien, pas d'autre chose à dire. Avantage, sortir en plein jour n'est pas un problème, étant donné qu'il faudrait déjà voir le "plein jour" pour s'en inquiéter. Inconvénient, je suis trempé, et ça, ce n'est pas pour alléger mon humeur. Ce qui risque de me mettre en boule également? Voir ce maudit Volturi tourner autour de ma fille. Il a de la veine d'être parti avant que je ne m'approche assez... et ok, Gwen est assez grande pour se débrouiller toute seule, aussi difficile que cela soit-il à avaler pour moi. Mais quand même.

A peine l'homme est-il parti que j'arrive à hauteur de ma fille, glissant un bras autour d'elle alors qu'elle me demande comment je vais, m'assurant en toute innocence être contente de me voir. Se rend-t-elle compte de qui est cet homme avec lequel elle parlait il y a deux minutes à peine?! A voir son expression, mon visage doit parler pour moi.

"Je m'inquiète pour toi, surtout quand je te vois en compagnie de l'un de ces chiens de Volturis. Et ne me dis pas que tu l'ignorais. Celui-là était là, ce soir-là. Je n'ai pas oublié."

Je me calme aussitôt. Ce n'est pas à ma fille de subir l'énervement que je sens naitre en moi. C'est à cette pourriture de Volturi et ses petits copains.

- Bien sur que je le savais... On s'est rencontré y a quelques mois de ça, pas longtemps après notre arrivée ici. J'ai voulu le tuer pour faire bonne mesure mais bien sur il m'en a empêché, je l'ai écouté parler et j'ai été convaincu. Après tout lui n'a rien fait d'autre que parler et dans mon souvenir pour nous défendre. Il m'a laissé une occasion de le tuer, mais je n'ai rien fait. Il m'a promis de ne rien dire de ma survie à ses maîtres, mais lui non plus ne fera rien pour les en empêcher si ils se souviennent de mon existence. Je peux difficilement l'en blâmer.

Je garde un instant le silence.

- C'est lui qui m'a renvoyé vers toi. Je crois que si il avait pas été là, je serais encore entrain de me dire qu'on ne pouvait pas se voir, ni se parler, que je devais oser espérer qu'on pouvait y arriver tous les deux.

Je le regarde en silence, espérant déceler quoi que se soit dans ses traits. Je sens son agacement bien sur quand il me parle, mais il finit par se calmer, tout du moins en apparence.

- Aujourd'hui, il venait simplement aux nouvelles et j'en conclus qu'il n'a rien dit comme il l'avait promis, sinon toi et moi, nous serions déjà retrouvés face à ces rois comme autrefois.

Ma fille, ma raison. Il n'y a pas à dire, elle a toujours été la plus sage de nous deux. Déjà à l'époque, c'est elle qui m'a convaincu de mieux cibler nos proies, de façon à épargner ceux qui ne méritaient pas de subir la morsure de nos crocs. Et aujourd'hui encore, son bon-sens parvient à refréner mon envie d'apprendre à ce maudit Volturi qu'on ne s'approche pas de ma fille sans en subir les conséquences.

"Un point pour toi. Mais méfie toi de lui tout de même. On ne sait jamais sur quel pied danser avec ces maudits serpents."

Je me recule légèrement, observant le beau visage de ma fille comme si je le voyais pour la première fois... comme à chaque fois que je la regarde. Physiquement, c'est toujours la fillette de 14ans que j'ai condamner à ne jamais atteindre l'âge adulte... mais les années qui se sont écoulées depuis, c'est dans son regard que je peux les déceler. Cette force avec laquelle elle compte réfuter mes arguments me convainc de ne même pas m'y essayer.

"Si tu n'étais pas venue à moi, c'est moi qui serait allé vers toi. Je t'ai déjà perdue par le passé... je ne commettrais pas cette erreur de nouveau."

Elle marque un point de plus en me disant que si celui-là avait parlé, ses maitres se seraient déjà tournés vers nous. Quoique j'ai cru comprendre que c'était bien assez le bordel dans la communauté vampirique pour qu'un peu d'intelligence suffise à comprendre qu'il y a plus important que régler les comptes avec nous.

"Sans doute as-tu raison. Excuse-moi d'être pire qu'une poule avec toi. Je m'inquiète pour toi mon cœur."

- Oui compte sur moi! Je ne me ferais pas avoir deux fois.

Je tente tout du moins de m'en persuader. une fois cette histoire de sang synthétique mis en place pour les différents régime, il y a aura moins de questions à se poser, ils pourront donc de nouveau se tourner vers les cas comme le mien. Mais en même temps je me dis que les humains à faire l'autruche sur notre condition se font de plus en plus rare. En effet ma mort en 86 était pour masquer ce que nous étions, mais ça n'avait plus lieu d'être aujourd'hui, alors peut-être que … Enfin quoi que ce Caïus, je crois que même si tout le monde lui criaient haut et fort qu'ils savaient qui j'étais et qu'ils ne risquaient rien avec moi il me tuerait tout de même. Pour le plaisir ? Oui je le crois au vu de son regard sur moi à l'époque, comme de celui de ses sbires, Hunter excepté. C'était tout du moins le souvenir que j'avais de ce jour là.
Tout était étonnamment clair dans ma tête. Au début, je n'avais pas comprit que j'étais morte parce que sous le choc ce souvenir a été effacé, mais au fur et à mesure les souvenirs me sont revenus comme des coups de poignards en plein cœur. Aujourd'hui, le bruit de mes os qui craquent et des hurlements de rage de mon père imprègnent mon esprit, peut être est-ce un cauchemars ou la réalité je ne sais pas, mais une chose est sûre c'est encré au plus profond de moi et ça ne partira jamais.
Pourtant malgré tout je continue à faire confiance aux gens… un brin naïve ? Oui c'est possible! Mais j'ai envie de croire que tous ne sont pas pareil et les gens que j'ai rencontré depuis m'ont prouvé que j'avais raison de leur faire confiance : enfin 90 % des personnes quoi!

- Et je t'en voudrais de ne pas le faire.

Je souris un peu plus timidement cette fois, pas convaincue que ma blague prenne. Je le sers de nouveau fort contre moi, enfouissant mon visage contre sa chemise comme je pouvais le faire autrefois, lorsque j'avais besoin d'être rassuré ou juste sentir sa présence. Malgré la présence d'Erke puis de sa femme, je mettais si souvent sentit seule. Il avait été comme un père pour moi, mais il ne l'était pas non plus, alors là j'étais aux anges et c'est bien ça qui me faisait peur, même si j'avais promis à Hunter d'essayer d'en profiter et de ne pas rejeter ce moment qui nous ai offert.

Mes deux bras passés autour du cou de ma fille, j'enfouis mon visage dans sa tignasse blonde. Qu'elle ne se fasse pas avoir de nouveau? Je crois que nous avons été deux à être trop naïf et ignorants de ce monde ce maudit jour. Ce n'est pourtant pas le moment que nous argumentions sur lequel de nous deux a le plus merdé ce jour là. J'en ai pas envie. Je veux juste profiter de ma fille et rattraper les trente années que j'ai perdu sans elle. Si on dit que l'amour d'une mère pour son enfant ne connaît ni loi, ni pitié, ni limite. Il pourrait anéantir impitoyablement tout ce qui se trouve en travers de son chemin, je dis que l'amour d'un père est au moins aussi fort. D'accord, je dirai que dans notre famille, je n'ai pas eu la concurrence difficile. Enfin, je crois que ma défunte épouse a vraiment aimé notre fille comme une mère se doit d'aimer son enfant, mais il devait y avoir trop de ressentiment entre nous pour que je le vois vraiment.

"Je m'en voudrais moi-même de ne pas le faire. Allé viens, ça te dit qu'on se fasse une glace?"

Pas bien diététique mais après tout, des vampires obèses j'en ai pas encore croisé. Pis une glace, pour se remonter le moral, je connais pas mieux. Ou si. Une soirée film/bol de chips, c'est pas mal non plus. Souvenir de crises de cœur d'Adélaïde. Quelque chose que j'ai raté avec ma fille, ce fameux premier crush suivi par l'inévitable premier rateau... Je pourrai dire que les avoir vécu avec Adé me suffit largement, mais c'est un truc de plus que j'ai perdu avec Gwen...

Ce qui me fait mettre le nez dehors alors que le soleil est à peine dissimulé derrière les nuages, c'est la migraine. Pas une migraine migraine, de celles qui vous fracassent le crâne et que techniquement, les vampires ne peuvent pas ressentir. Mais la migraine synonyme de ras-le-bol et de besoin de prendre l'air. Alors j'ai pris l'air. C'était ça ou envoyer valser un ordinateur. Alors plutôt que risquer de perdre les précieuses données qu'il contient, c'est moi que j'ai fait passer par la fenêtre. Métaphoriquement parlant.

J'ai besoin de vacances. Les paroles que j'ai prononcé devant Mina, évoquant remariage et mère patrie, étaient sincères et pensées. Une fois ce bordel terminé, je compte bien redevenir un vampire, et en faire profiter Mina ... et la crevette, parce que ça, je ne vais pas réussir à l'en débarrasser, alors, autant la compter du voyage. Si je pourrai dire qu'un accident est si vite arrivé? En vérité, j'ai finis par m'y habituer, à cette gamine, même quand elle pose des questions aussi débiles que "Est-ce que la maman d'un œuf de Pâques c'est une poule en chocolat ?". Bref, Mina s'y accroche, alors je fais avec. Si je l'apprécie au moins? Chaque personne qu'on s'autorise à aimer est quelqu'un qu'on prend le risque de perdre. Il n'y a de place que pour Mina dans mon cœur. Je ne lui redirai pas que ce qu'elle entreprend à se lier ainsi aux autres est dangereux, elle a déjà eu droit à cette leçon de ma part, ainsi qu'à me dire flute à ce propos. D'ailleurs, parlant de ceux auxquels on ne devrait pas se lier, mes pas me mènent face à face avec une autre part de la "famille". Silas et Gwen. Changer de trottoir? Un peu tard pour ça.

"Melle Evenson. Silas."

Ok il l'a pas si mal prit que ça, ça aurait pu être pire. J'aurais jamais cru qu'on pouvait se faire du mal en s'aimant trop ; mais peut être que si… Je ne supportais pas d'imaginer qu'il est pu souffrir à cause de moi, comme j'avais souffert de ne pas le voir pendant toutes ces années. Mais je dois changer de pensées; je n'ai pas envie de garder ce regard sombre qui est en train de barrer mon visage, je veux d'autre chose pour nous quand nous sommes tous les deux, ensemble comme jadis.
Je souris, même si c'est un poil forcé entre ce que je ressens pour cette glace et les pensées qui m'habitaient il y a un instant. Je ne pourrais jamais dire non à ça, c'est tellement bon une glace.

- Toujours partante pour une glace; j'te suis.

J'attrape sa main et me mets à avancer vers le dit magasin ou camion où il voudra bien nous emmener. Nous marchons quelques minutes avant de tomber nez à nez avec nul autre que mon boss : Dmitri Romanov. Paraît que c'est à lui qu'on doit d'être là, enfin sa femme en réalité mais vu que sa femme est une vampire grâce à lui. Enfin bref… Je suis toute fois assez contente de le voir, après tout il est plutôt cool comme patron tant qu'on fait bien notre boulot et j'ai eu la chance de ne pas le décevoir jusqu'à présent.

- Bonjour monsieur Romanov. Vous vous souvenez de mon père ? Comment va votre fille ?

Si je parlais trop ? Probablement oui. Ca me porterait préjudice un jour aussi, ça. Mais bon après tout il n'était pas obligé de répondre il ferait comme bon lui semblerait.

Nous nous mettons d'accord pour une glace et c'est main dans la main que nous prenons la route d'un glacier que j'ai repéré au cours de l'une de mes enquêtes.
Il ne nous faut cependant que quelques minutes de marche pour que nos plans soient contrariés par une rencontre impromptue avec le patron de Gwen, accessoirement le père adoptif de la gamine qui les accompagnait, Mina et lui, le jour où on s'est croisé pour la première fois. Je dois avouer qu'à le voir, cette partie de sa vie ne saute pas réellement aux yeux. C'est pas vraiment la fibre paternelle qu'on remarque en premier chez lui, et ce n'est pas difficile de comprendre que c'est sa compagne qui lui a imposé la petite. Enfin, leurs scènes de ménage, c'est loin de me regarder.

Je réponds à son salut en lui tendant une main. Je suis peu familier - pour ne pas dire totalement ignorant - des coutumes russes, mais cet homme semble avoir voyagé au fil des siècles, j'imagine qu'une poignée de main, il sait ce que c'est.

"Dmitri Romanov, c'est bien cela? J'ai entendu dire que le Docteur Cullen et vous ne sortiez plus vraiment de votre labo ces derniers temps. Qu'est-ce qui nous vaut l'honneur?"