S'allier à des vampires n'était pas ce qu'il appellerait une idée de génie. C'était plutôt un bon compromis, trouver un moyen d'éviter la famine pour les uns, et la mort pour les autres... Sorcier ou non, Arai restait un être humain, et donc, un met de premier choix pour la majorité des prisonniers de Blackstone. Plus le temps passait et plus l'angoisse grandissait: la population humaine diminuait drastiquement, et c'était un grand soulagement d'avoir fait la connaissance de vampires pensant à l'avenir avant leur estomac dans l'immédiat... Et surtout, d'apprendre qu'il existait des vampires "végétariens". Certes, leur espèce était encore en proie à la frustration, le sang animal n'apportant pas la même satisfaction que le sang humain, mais leur conscience influençait grandement leur motivation. Et parmi eux, il y avait certaines personnes prêtes à se plier à cette restriction pour le bien commun.

Arai se rendait donc plein d'espoir au labo que lui avait indiqué le Dr Cullen, pour réfléchir à une façon de préserver l'équilibre à Blackstone, peut-être aussi trouver de quoi révolutionner le monde, si un jour ils arrivaient à renouer le contact avec l'extérieur...
Tournant à l'angle d'un couloir, il reconnut la voix de Dimitri avant que ce dernier ne se tire, non sans une remarque raciste, comme à son habitude. Blasé, Arai hausse un sourcil en arrivant face à Carlisle, qui semblait tout aussi fatigué du comportement de son collègue.

"S'il arrêtait la vodka, il arriverait peut être à me regarder dans les yeux. C'est ce que je lui aurais répliqué, s'il m'avait insulté en face. J'imagine qu'on ne le comptera pas parmi nous aujourd'hui, donc."

Il soupira, à moitié soulagé de l'absence de ce type détestable, et à moitié déçu. Ils avaient besoin de toute l'aide disponible, trop peu de personnes se sentaient concernées par le problème du manque de... Nourriture à Blackstone. C'est assez angoissant d'avoir l'impression d'être un lapin au milieu d'une meute de loups affamés. Une chance qu'il ait côtoyé un vampire sanguinaire durant des années ou il n'en dormirait probablement pas. Arai entra dans la pièce, et se laissa tomber sur une chaise de bureau.

"Il est tout le temps comme ça, ou c'est la faim qui le rend désagréable?" Il tendit la main pour attraper un stylo sur le bureau, et le faire tournoyer entre ses doigts. "Je suis sûr que si on arrive à trouver un projet solide, il finira par accepter de collaborer. Si c'est le prix de la survie des êtres humains, je suis prêt à supporter ses insultes." Non sans avoir de la répartie, bien sûr.

Il sortit quelques tubes soigneusement refermés, contenant son propre sang pour faire quelques tests. L'idée principale étant de trouver quelque chose pouvant substituer l'hémoglobine... Et bien il était important d'avoir de quoi comparer. "A manipuler avec précaution, j'ai pas envie de me faire chasser par le labo entier parce qu'un des tubes s'est brisé..."

Il ne peut réprimer une grimace en entendant la remarque sur l’alcool. Certes, la réplique se voulait plus raciste qu’autre chose, en réponse à la provocation de Dmitri, et quoi de mieux que la vodka comme cliché sur les russes? Enfin, qu’il continue à boire, si ça le rend plus aimable et moins à même de le vider de son sang… Arai observe Carlisle de façon un peu distraite, jouant toujours avec le stylo bille dans ses mains. “Son problème avec les sorciers”... Les vampires n’en ont ils pas tous un, finalement? Vu qu’ils sont considérés comme une espèce à éliminer par la plupart des humains à pouvoirs, qui affirme qu’ils auraient été créés grâce à la magie noire. Vérité ou pas, les vampires avaient des émotions et méritaient autant de considération que n’importe quel être vivant, en tout cas, c’était ainsi qu’Arai voyait les choses, n’en déplaise à son ancien clan dont les membres s’étaient également retrouvés à Blackstone…

“Je n’en doute pas, Carlisle. Sinon je n’aurais pas proposé de vous aider. Les membres de mon clan ne soutiennent absolument pas mon initiative, d’ailleurs… Et ils ne sont pas les seuls: les sorciers en général sont opposés à une telle collaboration. Je suis un peu vu comme un traître par les plus réfractaires…”

Levant les yeux au ciel, il souligne le fait qu’il trouve cela ridicule. Faut vivre avec son temps, non? Enfin, si son clan savait pour son idylle amoureuse avec un vampire, il se ferait sûrement jeter. Là, à la limite, on peut comprendre un minimum la démarche: si la totalité des humains de Blackstone était “consommée”, ce serait la guerre entre sorciers, loups garous et vampires. Et il fallait à tout prix éviter cela…

“Mais qu’importe. Si on arrive à trouver un substitut au sang, on changera la vie de tout le monde. C’est tout ce qui compte, nan? Alors, au boulot!”

Il fit un petit sourire au médecin, avant de lever la main en l’air en murmurant une quelconque incantation, ce qui eut pour effet de soulever les fioles ainsi que les solutions chimiques qu’ils avaient réussi à rassembler après avoir fouillé toute la ville. Les ressources étaient assez limitées, une chance qu’ils aient un sorcier dans l’équipe: il pourrait dupliquer certaines substances, en créer d’autres grâce aux plantes présentes dans le secteur. L’avantage d’être un petit scientifique doté de pouvoirs magiques? On ne prenait jamais de risques puisqu’on ne manipulait rien avec ses mains. Un récipient en verre se retrouve flottant dans les airs, rempli par plusieurs petites bouteilles et fioles qui s’y déversent par magie sous les yeux de Carlisle qui ne doit pas avoir l’habitude de telles méthodes de travail. Pour Arai, c’est aussi nouveau de travailler ainsi sans être seul. Vous imaginez la tronche des collègues humains à l’Hôpital s’il usait de la magie ainsi? Le liquide finit par devenir rougeâtre à force de mélanges, et sautant de son siège, Arai fait flotter le récipient jusqu’à une petite machine dotée d’un microscope, pour comparer sa solution et les données récupérés de son sang. L’ordinateur semble analyser la fiole avant de leur crâcher un rapport sur la composition du truc.

“... Ouais, bon, c’était un crash test fallait bien commencer quelque part…” Il passe une main dans ses cheveux en soupirant. “Ca va prendre un certain temps, mais j’suis sûr qu’on peut trouver.” Il se souvient des paroles de Rue, lui demandant en boucle d’arrêter de vouloir sauver ce qui ne pouvait l’être. Le jour où il trouverait un substitut au sang, il irait le retrouver juste pour lui tirer la langue bordel. Ils allaient le faire. Peu importe le temps que ça prendrait! “Bon, j’vais faire du café. J’ten propose pas, hein? Ha.” Il hausse les épaules et saute de sa chaise pour aller lancer la cafetière et sortir un paquet de bonbons. Pas sa faute, il carburait au sucre.